
Un couple apparemment heureux. Marié depuis une vingtaine d’années, ils ont deux adolescents, une fille puis un garçon. Ils vivent en province. Elle est assez artiste. Mais son mari se retire de plus en tôt et de plus longtemps dans une pièce à part et elle se sent délaissée; en outre elle réalise qu’il possède 75% de leur belle résidence. Selon un accord conclu au tout début de leur mariage, elle s’occupe du quotidien tandis qu’il gère emprunts et immobilier. Elle suggère de changer. Il s’étonne, ne dit pas non mais procrastine. Un jour elle n’y tient plus. Cette femme parle à un écrivain qui a grosso modo la même situation conjugale. Une étrange double histoire en miroir débute. Que deviendra Suzanne, la femme du roman, fascinée par un tableau anodin du 19ème siècle représentant deux religieuses attendant un rendez-vous. Que cherche-t-elle dans ce tableau? Et que devient Sarah l’autre femme, la ‘vraie’ mais tout aussi fictionnelle que la première? Dans ce récit en escalier de Chambord, nous découvrons la vie mystérieuse d’un couple, le poids des non-dits, l’aspiration à être soi, la difficulté pour les enfants de comprendre ce que vivent leurs parents et bien d’autres choses. L’écriture est belle et fluide, soignée et familière à la fois, avec des dialogues notamment criant de vérité. C’est original et on ne sait pas comment le tout cela finira. C’est totalement profane mais une sourde inquiétude métaphysique traverse le propos. Que signifie habiter sa propre vie? J’ai été parfois perdu mais j’ai aimé l’ambition bien tenue du propos et la finesse narrative. Un roman implacable sur le couple d’aujourd’hui (et d’hier?) et sur les différences de ressenti et de réactions entre hommes et femmes.