
Sur une planète étrange, mais où se trouvent des humains – et des humains ayant des pensées et réactions humaines -, se forment depuis des centaines d’années des ‘hordes’, à savoir un groupe restreint d’une vingtaine de personnes spécialisées (pilier, ailier, traceur, aéromètre et géomètre, feuleuse et sourcière, troubadour et scribe). Comme cette planète est traversée de vents souvent furieux venant toujours de la même direction, l’Extrême-Amont, il s’agit, patiemment, mètre après mètre et année après année, de remonter toute la terre habitée depuis l’Extrême-Aval, et de découvrir ce qu’il y a tout au bout, l’origine des vents. Sur ce lieu circulent bien sûr toute sorte de légendes. Les péripéties et épreuves s’enchainent tandis que l’histoire des personnages se révèle peu à peu et que se complexifient les relations entre les compagnons d’aventure. Nous suivons le tout de façon fort claire (je craignais que ce ne soit compliqué mais tout est limpide car si les personnages parlent tour à tour, l’action est, elle, en continu) en écoutant les réflexions de chaque personnage (certains plus que d’autres). L’inventivité imaginative et verbale est extraordinaire et le tout captivant. J’ai absolument adoré (après avoir hésité trois ans à me lancer sur la recommandation de compagnons jésuites; merci à eux, notamment Xavier, pour le tuyau). C’est un roman profondément métaphysique et d’une grande humanité. J’ai pris des centaines de notes et retrouvé le goût de lire de la fantasy de mes dix-sept ans. Certes, la dimension religieuse (qui n’apparaît que dans les jurons!) a été gommée et il n’y a ni religion ni rites (de ce point de vue, c’est extrêmement français dans son refus de faire sa place au monde du religieux) mais l’expérience littéraire est unique: un ouvrage comme on en lit peu dans une vie.