C’est une phrase de Roberto Bolaño que l’auteur a choisie comme titre, assumant ainsi sa culture littéraire et ses goûts. Le livre nous raconte la vie d’une jeune écrivain africain sénégalais vivant en France et ressemblant sans doute bigrement à l’auteur et qui se met à enquêter sur un livre écrit avant guerre par un écrivain retombé dans l’oubli. Le style est brillantissime et la construction subtile. Très déçu l’an dernier par le Goncourt, j’hésitais à franchir le pas mais le prêt d’un compagnon m’a aidé à le faire et je n’ai pas été déçu! C’est un livre à la fois remarquablement écrit et très intelligent. Dès que l’on pourrait craindre un cliché, il nous prend à revers par une phrase d’une grande finesse. L’histoire est simple en apparence: un jeune sénégalais qui désire devenir écrivain – de l’âge de l’auteur et on peut imaginer qu’il y a mis pas mal de lui – entame une quête complexe sur la piste d’un livre de 1938 d’un très étrange écrivain, TC Elimane, sur lequel on ne sait presque rien. Cela nous parle bien sûr du Sénégal, et plus largement de l’Afrique francophone dans son rapport à Paris, mais au-delà de cela, il nous parle certes de littérature mais avant tout de la vie et de ses facettes infinies. Comme les jurys du Goncourt j’imagine, j’ai été impressionné par l’intelligence de l’auteur qui sait aussi se décrire avec un sens certain de l’autodérision et en jouant astucieusement sur ce qu’est un ‘plagiat’. Mais comme la langue est belle! Elle est élégante sans être lourde, classique tout en étant parfois très moderne, à l’occasion crue sans jamais être vulgaire. Les dilemmes, réflexions, tensions, d’un jeune africain (francophone) d’aujourd’hui (et d’hier) sont rendues avec force et finesse.